LA PUISSANCE DE L'ARBRE AU SERVICE DE L'HUMANITÉ

En novembre 2014, il y a donc juste neuf mois, j'ai ressenti un profond choc émotionnel alors que je contemplais des chênes par la fenêtre de la salle où je prenais le petit déjeuner. Ils étaient tout à fait ordinaires, chétifs, et un peu tordus comme la plupart des chênes qui poussent dans ces collines arides du sud de la France. Ils étaient simplement là, avec leurs troncs noirs et leurs feuillages roux, immobiles sous la pluie. En un instant, j'ai été rempli d'une immense compassion pour ces êtres modestes et silencieux et, plus tard, lorsque mon regard a embrassé le paysage couvert de forêt, ce sentiment est revenu, décuplé, comme une vague immense. Pendant toute cette journée, j'ai été habité par une sorte d'extase où se mêlaient gratitude, émerveillement et joie.

En 56 ans d'existence, je n'avais jamais ressenti à quel point les arbres sont, sur cette terre, essentiel, vitaux. Au plus profond de mon être, au-delà de tout raisonnement, j'ai perçu ce jour là la profondeur du lien qui me reliait à eux. J'ai senti intimement, dans chacune de mes cellules, que j'étais relié aux arbres et à tous les êtres de la forêt par la Vie même. Ce qui fut extraordinaire dans cette expérience, c'est de connaître cette unicité avec tous les êtres vivants de manière intuitive, corporelle, "vivancielle", comme dirait mon ami Bruno Giuliani.

Cette journée très spéciale a définitivement scellé ma sympathie pour les arbres. En tant qu'ingénieur des ponts, des eaux et des forêts, j'ai côtoyé dans ma vie des forestiers, des scieurs, des spécialistes de la biodiversité forestière et j'ai moi-même créé une société de transformation du bois. Deux personnes ont tout particulièrement contribué à ce que je réalise encore davantage toutes les potentialités des arbres : Eric Escoffier, permaculteur, et Francis Hallé, scientifique, dont l'Éloge de la plante m'a passionné.

Alors que je suis en pleine "transition du milieu de vie"* chaque jour qui passe consolide ma conviction que l'arbre –et plus largement son écosystème, c'est-à-dire la forêt– est notre allié le plus précieux dans les mutations impressionnantes que traverse notre monde. Il sait produire des matériaux (du bois, du caoutchouc, des résines) de la nourriture (des fruits) sans consommer ni travail ni énergie tout en régénérant le sol, en régulant le cycle de l'eau et en offrant un abri pour les animaux, les autres plantes sauvages, les champignons et tout ce peuple invisible des micro-organismes.

Avec le projet REGENESIS, j'entreprends aujourd'hui un périple à la rencontre de l'arbre de vie, pour révéler que nous pouvons créer grâce à lui un monde d'abondance et de joie. Là où l'agriculture a détruit les sols et les nappes phréatiques, là où les déserts avancent, là où l'industrie laisse des sols pollués, là où la survie des animaux sauvages et menacée, l'arbre apporte des réponses simples, économiques et écologiques.

J'ai pour ambition de cheminer avec cette source d'inspiration puissante qu'est la Permaculture pour montrer qu'une alternative à l'agriculture existe. Depuis la révolution du néolithique et l'avènement des sociétés patriarcales, les forêts reculent devant les charrues, le bétail, les villes et l'industrie avec les conséquences que nous connaissons : dérèglement climatique, effondrement de la biodiversité, destruction des sols, pollution de l'eau...

À l'opposé de la course au progrès technique et à l'appropriation des ressources, il s'agit maintenant de faire confiance aux ressources du vivant pour régénérer nos corps, les sols, l'air, l'eau… et nos esprits inquiets et stressés.

Dans toutes les cultures, l'arbre est associé à la sagesse, à la connaissance. En s'élançant vers le ciel, il nous invite à l'élévation spirituelle. Par ses incomparables capacités biologiques, notamment de concentration de l'énergie, par les services et les plaisirs qu'il donne, l'arbre est l'ami végétal avec lequel L'Humanité doit construire son avenir.

Je raconterai ici l'histoire du projet REGENESIS dont le but ultime est de contribuer à faire de notre planète un nouveau jardin d'Éden ou une Humanité éclairée et consciente vivra dans l'abondance et la joie.




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* voir le livre de Christophe Fauré, Maintenant où jamais, qui explique comment, par différents chemins, nous traversons une période de deuil pour abandonner nos conditionnements avant d'entrer dans la phase d'individuation.